• Vie scientifique et culturelle,

Quand l’émotion joue avec le rationnel

Publié le 29 novembre 2012 Mis à jour le 29 novembre 2012

Portrait de Jean-François Bonnefon, directeur de l'UMR CLLE (Cognition, Langues, Langages, Ergonomie). Extrait du portfolio d'équipe réalisé à destination des journalistes

Photo Jean-François Bonnefon - Crédit Emilie Lescale
Bien qu’il se présente comme un psychologue, la motivation première de Jean-François Bonnefon est bien d’ordre métaphysique. Son postulat : l’homme est doté de raison, mais il paie très cher cet accident de l’évolution, qui le rend pleinement conscient de sa mortalité,  perturbant considérablement ses capacités d’abstraction et de jugement.  Sur cette base, l’homme de raison peut-il faire des choix absurdes ?

De ce questionnement, Jean-François Bonnefon a fait une problématique de recherche. En témoigne la publication récente de son ouvrage « Le raisonneur et ses modèles », où il montre comment en quinze ans de recherches récentes « le postulat selon lequel nos esprits jugent et décident en manipulant de façon désintéressée des informations dans un lieu vide d'interactions sociales » a volé en éclat, « en prenant acte que nous raisonnons en être social et intéressé qui doit parfois se contenter d'informations douteuses pour tirer ses conclusions ».

Retour en arrière. La psychologie entre dans la vie de ce jeune toulousain, après un baccalauréat scientifique et deux ans en classe préparatoire, maths sup et maths spé. En cours de route, il découvre les nouveaux outils de l’intelligence artificielle, et les programmes informatiques qui prennent des décisions sur la base de règles et d’exceptions. En 2003, il soutient une thèse de doctorat en psychologie cognitive. Il est recruté au CNRS l’année suivante.     

L’interdisciplinarité de ses travaux lui vaut d’être accueilli pendant plus de cinq ans par deux   laboratoires, le CLLE dont il est l’actuel directeur, et l’IRIT où il fut un invité permanent. En 2008, il obtient la médaille de bronze du CNRS pour ses travaux à l’interface entre sciences cognitives et sciences et technologies de l'information.

« Idéalement, grâce à nos capacités d’abstraction, nous devrions raisonner, juger, décider de manière infaillible. Or nous ne faisons rien de tout cela. Notre culture, notre politesse, la conscience de notre mortalité nous éloignent de la rationalité. Je m’efforce de comprendre pourquoi » explique-t-il.

Ses méthodologies sont très proches de celles des sciences exactes. Elles font appel à des observations  et à des mises en situation qui servent ensuite  à l’établissement de modèles. Il a notamment supervisé un programme de recherches expérimentales, montrant comment le souci que nous avons de ménager les émotions des autres ou celui de se conformer à des modèles culturels influencent les processus mentaux qui nous amènent à des choix ou à des préférences.

En savoir plus sur le laboratoire CLLE