#16. Agnès Lagnoux Renaudie, chercheure au carré

Publié le 5 avril 2022 Mis à jour le 5 septembre 2022

Agnès Lagnoux Renaudie est chercheure en mathématiques appliquées, spécialisée en statistique et probabilités. Sa recherche porte sur l’improbable et l’aléatoire, qu’elle modélise pour élaborer des scénarii applicables à de nombreux domaines...

Les mathématiques sont partout, s’émerveille Agnès Lagnoux Renaudie, citant l’exemple du chou romanesco comme parfait objet mathématique à figure fractale ! Comprenez : un objet qui se répète à l’identique à différentes échelles. Depuis toujours, les mathématiques sont, pour la chercheure, un jeu. Rien d’étonnant alors qu’elle consacre une partie de ses travaux aux probabilités, dont la théorie a pour origine l’aléas, le jeu de dés en latin. Sur le bureau de la chercheure sont soigneusement rangées des feuilles recouvertes de calculs, formules et autres symboles mathématiques. Tous écrits à la main. Ainsi travaille Agnès Lagnoux Renaudie. Et comme à chaque fois, au départ il y a la page blanche… Cette page blanche source d’angoisse et qui l’a longtemps fait hésiter à se lancer dans la recherche.

Elle se destinait davantage à l’enseignement. Ce fut d’ailleurs une évidence, dès le collège. Une vocation qu’elle explique par l’héritage familial. Son père enseignait la biologie, sa mère était conseillère principale d’éducation. Elle excelle en mathématiques et décroche la mention Bien au baccalauréat. Elle veut tenter le concours du Capes, mais préfère commencer par deux années de classes préparatoires à Pau avant de pousser les portes de l’Université Paul Sabatier. Elle obtient le Capes en même temps que la Maîtrise (avec mention Très bien) et consacre l’année suivante à préparer l’agrégation. Une année difficile, laborieuse et fructueuse, à l’issue de laquelle elle comptait commencer à enseigner.

Mais voilà, l’un de ses enseignants, le mathématicien Dominique Bakry dont les travaux en probabilités sont reconnus dans le monde entier, décèle en elle la vocation de la recherche. Elle se souvient avec amusement de sa technique pour repérer les bons étudiants : il écrivait au tableau de la main droite en même temps qu’il effaçait de la main gauche, imposant une cadence de prise de notes qu’Agnès Lagnoux Renaudie arrivait néanmoins à tenir. Encouragée par Dominique Bakry, elle entame donc un DEA, par simple curiosité dit-elle, et commence à travailler sur les événements rares. C’est-à-dire la modélisation scientifique de ce qui a une infime probabilité de se produire... Ou la façon dont la théorie probabiliste cherche à comprendre ce qui n’est presque jamais observé et pour lequel par définition, le chercheur n’a aucune donnée de départ. La fameuse page blanche.

Pour Agnès Lagnoux Renaudie, l’intérêt est immédiat. Elle se passionne pour l’étude des événements rares et y consacrera sa thèse sous la direction de Dominique Bakry et Pascal Lezaud (enseignant-chercheur à l’École nationale de l'aviation civile - ENAC - et membre de l’Institut de Mathématiques de Toulouse - IMT). Elle étudie un algorithme mimant l’occurrence d’un événement rare. Un travail qui lui vaut la mention Très Honorable. Elle commence à enseigner à l’Institut national des sciences appliquées de Toulouse (INSA), puis poursuit en post-doctorat au sein du Laboratoire de Statistique et Probabilités de l’Université Paul Sabatier.

A l’Université Toulouse-Jean Jaurès, où elle décroche un poste de maître de conférences, Agnès Lagnoux Renaudie va élargir ses thématiques de recherche vers les processus gaussiens, les grandes déviations et l’analyse de sensibilité. Dès sa prise de poste, elle est intégrée au sein de l’IMT par le mathématicien Fabrice Gamboa à un projet de recherche ANR sur l’analyse de sensibilité. Dans ce domaine des statistiques, la chercheure travaille l’analyse théorique afin de valider la pertinence et l’estimation d’indicateurs qui permettront de quantifier l’influence des paramètres du modèle étudié. Concrètement ces travaux trouvent leurs applications dans des domaines très variés, notamment là où interviennent de nombreux paramètres et où doivent être pris en compte les facteurs d’incertitudes les plus influents. Le nucléaire par exemple, avec la simulation du comportement du stockage des déchets radioactifs. L’automobile, où l’analyse de sensibilité permet de mieux designer les pâles des ventilateurs dans les moteurs… Les mathématiques sont partout.

Et c’est dans ce sens que la chercheure les enseigne aux étudiants de Master en alternance. Pour les préparer au monde de l’industrie. Une enseignante bienveillante mais exigeante, comme elle se définit elle-même. Elle veille à ce que les exercices soient compris, les réexplique et les reformule au besoin, distribue les polycopiés. Habilitée à diriger des recherches depuis 2019, elle accompagne avec la même bienveillance les jeunes chercheurs. Agnès Lagnoux Renaudie transmet également sa passion aux collégiens et lycéens à travers les ateliers de l’association MATh.en.JEANS. En recensant par exemple le nombre de poissons dans le lac de Marciac, elle leur fait découvrir les notions d’aléa, d’estimation statistique ou encore de modélisation. Quand on vous dit que les mathématiques sont partout…

 

Agnès Lagnoux Renaudie : Maître de Conférence en mathématiques (depuis 2008). Chercheure au sein de l’Institut de Mathématiques de Toulouse (IMT), équipe de Probabilités et équipe Statistique et Optimisation. Responsable du Master 2 ISM-AG, Ingénierie et Sciences des données orientées Métier et Appliquées à la Gestion de production.