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Biblioclasmes ! Créations / destructions

Publié le 12 juillet 2023 Mis à jour le 21 décembre 2023
du 2 octobre 2024 au 4 octobre 2024

Colloque national organisé par le laboratoire PLH

« Détruire les livres » ne saurait constituer pour nous un mot d’ordre. La question n’en est pas moins capitale si l’on admet que « [l]’attitude biblioclaste remonte à la nuit de l’écriture », pour reprendre le mot de l’historien du livre Lucien X. Polastron.

La destruction de livres a souvent été étudiée sous un angle idéologique ou historique, notamment en lien avec l’histoire de la censure : elle est la plupart du temps appréhendée comme un moyen mis au service d’une fin qui concerne les textes, les idées et les êtres vivants qui les expriment ou qui les lisent. Peut-on en dire plus, ou en dire autre chose ? Le geste biblioclaste en lui-même, loin d’être anodin, représente en effet un véritable tabou dans les cultures dites « du livre », un interdit suprême lesté d’évidentes implications symboliques.

Pourtant, le roman moderne ne s’ouvre-t-il pas sur la destruction de la bibliothèque de Don Quichotte ? La fin des livres ne hante-t-elle pas nombre de récits fictionnels, depuis le labyrinthe borgésien ou le Nom de la rose à l’univers dystopique de Fahrenheit 451, jusque dans le livre de jeunesse ? Le livre d’artiste n’est-il pas en partie fondé sur le paradoxe de « bibliophiles… biblioclastes », pour reprendre le titre d’un numéro de la revue L’Art vivant de 1974 ? Si le respect des livres, voire leur amour, sont supposés être au cœur de l’écriture et de la lecture, ils peuvent également donner lieu à des revirements contre eux. La bibliophilie et le biblioclasme engagent ainsi la question même de la création et de la confrontation entre ses idéaux et ses supports matériels.

Car c’est bien de la matérialité des supports qu’il est question, et de la difficulté de la prendre en compte. Cette difficulté tient d’une part à l’approche littéraire, qui tend à dématérialiser le texte au profit de l’œuvre, et d’autre part à l’idéologie technique actuelle qui associe de façon trompeuse la mutation numérique à une « dématérialisation » menaçante, suscitant en retour une célébration du livre-papier dans l’édition et donnant lieu à quantité de détournements sur les réseaux sociaux.

Sans relativiser ni minimiser d’aucune manière la dimension politique des biblioclasmes, c’est cette dualité entre destruction et création que le présent colloque souhaite interroger en mettant au cœur de sa réflexion la matérialité du livre, que ce soit sous un format papier ou numérique, autant que sa dimension symbolique.

À quelles conditions, selon quelles modalités et avec quelles implications la destruction de livres peut-elle se présenter comme un instrument paradoxal de création ?
Les enjeux et les formes de ces rapports paradoxaux et problématiques aux livres seront explorés dans le domaine littéraire et à travers ses relations avec d’autres arts, dans des aires géographiques et culturelles variées et à des périodes différentes.

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Contact :
Marine LE BAIL et Benoit TANE